Les secrets du coffre-fort #1
16.2.18La société métallurgique de l'Oural-Volga
Ceci est un emprunt
russe retrouvé dans le coffre-fort de Monsieur Eugène. Les fameux emprunts
russes. Celui-ci date de 1902 et a été émis au profit de la Société Métallurgique de l’Oural-Volga. Une
société française créée en 1897 et transformée en société russe en 1916 dont l’objet social était "l'exploitation en
Russie de hauts fourneaux, forges, aciéries, laminoirs, tréfileries,
pointeries, ateliers de construction, usines de dénaturation du fer ainsi que
forêts et gisements miniers".
A la fin du XIXe, la Russie est à la mode en France
qui cherche en ce pays un nouvel allié face à l’Allemagne. En gage d’amitié, le
gouvernement français choisit d’investir massivement en Russie. Et pour cela il a la riche idée de faire appel aux épargnants français. "Prêter à la Russie, c'est prêter à la France !"
disait-il ! Et les français y répondirent en masse si bien qu’en
l’espace de trente ans c’est près d'un tiers de l'épargne française qui est
investie en Russie, pour un montant d'environ 15 milliards de francs or (soit l'équivalent de 53 milliards d'euros !).
Poussés par les médias et les banques (qui dit-on auraient été grassement rémunérés par les russes pour ce faire), certains y mirent toutes leurs
économies. Avec le cumul des prêts des autres pays embarqués dans l'aventure, cela contribua très fortement au développement économique de la
Russie qui créa des dizaines de milliers de kilomètres de lignes de chemin de fer, le Transsibérien, de nouvelles industries chimiques, mines, etc.
Mais en 1917 ce fut la Révolution russe ! Les
bolcheviques arrivent au pouvoir et annoncent, quelques mois à
peine après leur triomphe, qu’ils ne rembourseront pas les épargnants français !
Pourquoi rembourseraient-ils des emprunts qu’ils n’ont pas contractés ?
Résultat des courses : nos pauvres compatriotes, encore meurtris par la Grande Guerre se retrouvent sur la paille ! Notre Eugène n’est pas en reste. Nous en avons
trouvé pour 5000 francs. Sachant qu’un salaire "élevé" de l'époque était de l’ordre de
2000/2500 francs par an, on peut penser qu'il y a laissé une coquette somme.
Depuis lors, nos politiques n’ont eu de cesse de
faire pression sur l’état russe pour tenter d’obtenir un remboursement des
emprunts. En 1997, la France a officiellement renoncé aux créances russes antérieures à 1945 moyennement un versement par les russes de 400 millions de dollars qui auraient été redistribués entre les porteurs de titres enregistrés. L'AFIPER (Association
Fédérative Internationale des Porteurs d'Emprunt Russes) ne lâche cependant pas l'affaire, considérant cette somme comme une bagatelle car elle ne représenterait qu'1 % de la dette totale ! Pour un bon de 500 francs de 1906, ils estiment en effet que les obligations pourraient valoir aujourd’hui entre 8.218
et 31.221 euros (la fourchette est large ...), ce qui ferait une estimation des bons de M. Eugène comprise
entre 82.180
et 312.221 euros ! On peut toujours rêver ...
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